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Réf. 0030

Un incinérateur surdimensionné à St-Benoit, très couteux pour les habitants, alors que d’autres solutions moins couteuses existent

Henri

Barrault -

3 juillet 2024

L’objectif visant une réduction des déchets de seulement 16% en 8 ans est très peu ambitieux. Effectivement, l’ADEME précise que près de 80 % des déchets de la poubelle noire sont recyclables ou compostables, ce qui est confirmé par l’étude du SMICTOM du Chinonais qui relève que près de 75% des déchets de la poubelle noire ne devraient pas y être et avoir été évités ou triés par les habitants. Pour ce qui concerne les bennes tout venant en déchèterie, 80% de leur contenu relève soit d’une filière REP (Responsabilité Elargie du Producteur), soit peuvent être recyclés. Installer un incinérateur surdimensionné à Saint-Benoit-la-Forêt pour brûler ces déchets évitables constitue une aberration.
En effet, les dangers de l’incinération sont bien documentés : Santé Publique France rappelle que les incinérateurs émettent de multiples polluants : « dioxines, furanes, PCB, CO, oxydes d’azote (NOx), sulfates (SOx), acide chlorhydrique (HCl), cadmium, plomb, chrome, mercure, arsenic, béryllium, hydrocarbures aromatiques (HAP) et poussières. Parmi ces substances certaines sont cancérigènes ou potentiellement cancérigènes (PCB, cadmium, chrome, plomb, HAP) et il est aussi envisageable que l’interaction entre ces substances joue un rôle» (https://www.santepubliquefrance.fr/determinants-de-sante/pollution-et-sante/air/articles/questions-reponses-sur-les-etudes-sur-les-incinerateurs). Par ailleurs, selon un article du journal Le Monde du 7 février 2022, « aussi toxiques que persistantes dans l’environnement, les dioxines figurent sur la liste noire des composés chimiques les plus préoccupants de l’Organisation Mondiale de la Santé. Elles sont classées cancérogènes pour l’homme par le Centre International de Recherche sur le Cancer. Dangereuses même à des doses infimes, elles s’accumulent dans la chaîne alimentaire». Ainsi, la consommation d’œufs a été interdite pendant plusieurs semaines en 2022 par les pouvoirs publics dans une grande zone entourant l’incinérateur d’Ivry, car les œufs des poulaillers environnants concentraient les dioxines de l’incinérateur après un pic de pollution. La pollution ne se limite pas à ces rejets atmosphériques: pour une tonne de déchets incinérés, on obtient 250 kg de mâchefers (cendres) qui contiennent, souvent en quantité importante, des polluants avérés comme le plomb et le cadmium, du mercure et autres métaux lourds, ainsi que des dioxines. De plus, un incinérateur de 40000 tonnes rejetterait annuellement plus de 35000 tonnes de CO2, un gaz qui réchauffe l’atmosphère, alors que les experts du GIEC recommandent au contraire de diminuer les quantités de CO2 rejetées dans l’atmosphère.
Sur un autre plan, les coûts de traitement des déchets sont en augmentation constante: le SMICTOM du Chinonais le reconnaissait dans son rapport de 2020, en précisant que les coûts continueraient d’augmenter tant qu’on ne réduirait pas la quantité de déchets. De plus, les rapports annuels du SMICTOM montrent que depuis plusieurs années ces coûts augmentent plus rapidement que l’inflation : ainsi la contribution par habitant s’élevait à plus de 117 € en 2022, en hausse de 12% par rapport à 2021, et largement au dessus de la moyenne nationale en milieu rural de 88 € par habitant. Ces constats militent pour une politique radicale de prévention des déchets, visant à les éviter et en réduire la source. Au contraire, un incinérateur a besoin d’une quantité de déchets constante qui va à l’encontre d’une réduction des déchets et d’une maîtrise des couts.
Ainsi, les habitants paient finalement deux fois : ils contribuent au remboursement d’un incinérateur surdimensionné et ils paient de plus en plus cher pour la gestion et le traitement des déchets.
La meilleure solution face à cette situation consiste à faire payer en fonction de la quantité de déchets que l’on produit. Ainsi, plutôt que de payer une taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) en pourcentage de la taxe foncière, non reliée au cout réel des déchets, les communes qui réussissent le mieux à diminuer le cout pour les habitants ont mis en place une redevance d’enlèvement des ordures ménagères (REOMI) fonction de la quantité de déchets produits par habitant. Cette méthode présente au moins trois avantages : elle est équitable, car plus on produit de déchets, plus on paie ; elle est juste car qui produit peu de déchets ne contribue pas à la place de qui en produit beaucoup ; elle est incitative car elle conduit à réduire sa propre quantité de déchets. De nombreux opposants à ce système mettent en avant le fait que les ménages vont jeter leurs poubelles dans la nature ou dans la poubelle du voisin, faisant croire que les habitants sont généralement indisciplinés et irrespectueux. L’expérience des collectivités l’ayant mis en place montre qu’en réalité, ces incivilités restent extrêmement marginales, qu’elles disparaissent en quelques mois, et que les aspects vertueux du dispositif sont reconnus par la majorité des habitants.
En conclusion, l’incinération est une fausse solution, couteuse en argent public (c’est-à-dire celui des habitants), néfaste pour la santé humaine, pour l’environnement et pour le climat. La meilleure solution consiste à réduire drastiquement les déchets à la source, entre autres en faisant payer en fonction de ce que chacun produit (principe du pollueur/payeur), et ceci à minima à l’échelon d’une comcom, et si possible à l’échelon départemental.

Cette publication a un commentaire

  1. Syndicat Touraine Propre

    Merci pour votre contribution, vous trouverez ci-dessous les réponses de Touraine Propre et du groupement du Sud tourangeau, maîtres d’ouvrage de cette concertation.

    Le programme de prévention départemental propose un objectif de réduction des déchets ménagers et assimilés (DMA) de 16% entre 2022 et 2030, c’est-à-dire une réduction de 531 kg/hab/an à 446 kg/hab/an d’ici 2030. D’un point de vue réglementaire, cet objectif départemental répond et dépasse les objectifs régionaux fixés par le SRADDET.
    Les perspectives de réduction concernant la poubelle noire avancées par l’ADEME que vous mentionnez sont évidemment motivantes. Ce gisement fait d’ailleurs l’objet d’une attention particulière, déjà par la mise en place récente de l’extension des consignes de tri (entraînant un report de certains déchets de la poubelle noire vers la poubelle jaune), et le tri à la source des biodéchets qui nécessite encore d’être porté et déployé dans l’ensemble du département. Le programme de prévention départemental propose de s’attaquer aux 3 flux qui constituent les déchets ménagers et assimilés (DMA) : les ordures ménagères, la collecte sélective ainsi que les déchets collectés en déchèteries.
    D’un point de vue très local, entre 2010 et 2022 (12 ans) en Indre-et-Loire, nous n’avons réduit nos déchets ménagers que de 4%, cela donne une idée de l’effort collectif à déployer pour réduire de 4 fois plus en 2 fois moins de temps (6 ans, 2024-2030).
    Evidemment, cet objectif de -16% est un objectif “seuil”, un minimum à atteindre, et si l’ensemble des acteurs s’implique dans cette démarche, nous pourrons certainement obtenir de meilleurs résultats.

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