Retour sur la table ronde « Traiter et valoriser énergétiquement nos déchets »
Nous avons eu le plaisir d’organiser une table ronde sur la thématique « Traiter et valoriser énergétiquement nos déchets » dans le cadre de cette concertation publique.
Nous remercions Le Prisme – coworking, que nous a accueilli pour cet événement, ainsi que les intervenants et les personnes présentes pour leur engagement et leur participation active !
Les intervenants à cette table ronde
👤 Martin Cohen, Président de Touraine Propre, a ouvert la session en présentant les enjeux et les objectifs de cette concertation publique dédiée à la prévention et au traitement de nos déchets.
👤 Laurent Gérault, directeur du SIVERT de l’Est Anjou, a ensuite présenté le fonctionnement de l’Unité de Valorisation Énergétique (UVE) de Lasse et le bilan de ses 18 ans de fonctionnement.
👤 Fabrice Voiry, directeur de la Transition Énergétique de Tours Métropole Val de Loire, a mis en lumière le fonctionnement et les impacts d’un réseau de chaleur urbain, son int
Le support de la table ronde
Synthèse des échanges
Un participant interpelle Monsieur Gérault sur le fonctionnement d’un incinérateur qui produit plus de déchets qu’il n’en réduit et cite quelques chiffres.
- 380 tonnes de mâchefers
- 800 kg de CO2 par tonnes de déchet incinéré
- Refiom
Il ajoute que ces déchets viennent augmenter les émissions de gaz à effet de serre, qui sont déjà un problème majeur.
Que deviennent les mâchefers de l’UVE de Lasse (Maine-et-Loire) ?
Réponse de Monsieur Gérault :
Pour le site de l’UVE de Lasse, ils sont analysés puis valorisés. Ils sont traités sur site, notamment sous forme de sous-couche routière pour constituer les voies d’accès vers le méthaniseur.
Un logiciel de la DRIEAT permet de localiser l’utilisation de ces mâchefers.
Que deviennent les dioxines générées lors de l’incinération et sont-elles toxiques ?
Réponse de Monsieur Gérault :
Elles sont concentrées dans les REFIOM et emmenées en installation de stockage de déchets dangereux (ISDD de Classe 1) située en Vendée. Concernant leur toxicité, Monsieur Gerault avance que le zéro n’existe pas et que c’est la dose qui fait le poison. Tout dépend de la dose létale.
Lors de sa présentation, Monsieur Gérault souhaite diffuser une vidéo du Professeur Narbonne, expert sur les dioxynes. (cf diapo 24 : https://youtu.be/EwXrZfzXLDo)
NB : cette vidéo ne sera pas diffusée pour des raisons de souci technique.
Un participant signale que ce professeur a fait l’objet de controverse et que ces travaux ont été remis en cause par la communauté scientifique.
Qu’est-ce que le REFIOM ?
Les REFIOM sont les Résidus d’Epuration des Fumées d’Incinération des Ordures Ménagères. Il s’agit de la concentration des déchets toxiques après incinération.
Réponse de Monsieur Gérault :
Sur le site de Lasse, 4 000 tonnes de REFIOM sont générées pour 115 000 tonnes de déchets traités annuellement.
Le fioul est-il utilisé pour l’UVE de Lasse ?
Réponse de Monsieur Gérault :
Oui, à l’allumage du four pour le faire monter à la température de combustion. Cette phase représente en moyenne 16h sur les 1 000 heures d’utilisation annuelle d’un four. L’usine est une centrale thermique, elle produit de l’énergie, et elle consomme très peu de fioul.
Quand l’usine est à l’arrêt, quelle énergie est utilisée ?
Réponse de Monsieur Gérault :
Quand l’usine est à l’arrêt, elle est alimentée par le biogaz produit par le méthaniseur situé sur le site.
Un des participants souligne l’obligation d’avoir une quantité nominale de déchets pour faire tourner une UVE. Par conséquent, l’UVE est un aspirateur à déchets. Il faut trouver des déchets ailleurs pour alimenter l’usine et donc cela n’incite pas à les réduire.
Réponse de Monsieur Gerault :
Les déchets existent, c’est une réalité. Dans le Maine-et-Loire, les usines d’incinération arrivent à saturation. Or certaines collectivités n’ont pas de solution et les sollicitent. On a beau diminuer les déchets, les collectivités qui enfouissaient auparavant leurs déchets résiduels, cherchent désormais à les valoriser en électricité dans un souci de maîtrise des coûts.
Quelle sorte de loi interdit les décharges ?
Réponse de Monsieur Gérault :
Je ne suis pas parlementaire donc je ne suis pas un spécialiste de la loi. La hiérarchie des modes de traitement stipule cependant que l’on doit éviter l’enfouissement car c’est la pire des solutions.
Acceptez-vous les déchets industriels à Lasse ?
Réponse de Monsieur Gérault :
Sur les 115 000 tonnes traitées chaque année dans l’usine de Lasse, les DAE (Déchets des Activités d’Entreprise)représentent 8 000 tonnes.
Qui paient l’incinération de ces déchets ?
Réponse de Monsieur Gérault :
Ce sont les entreprises qui paient l’incinération de ces déchets.
Quel est le besoin en surface d’une UVE ? Et qu’est-ce que ça représente autour en milieu rural ?
Réponse de Monsieur Gérault :
Le site de l’usine de Lasse a une superficie de 3,5 hectares. Cela peut représenter davantage de superficie si une usine ou un projet de diversification est prévu en annexe.
Pour Lasse, il s’agit de serres à tomates qui couvrent 4 hectares de terrain supplémentaires.
Que fait-on du surplus de chaleur en milieu rural s’il n’y pas de réseau de chaleur ?
Réponse de Monsieur Gérault :
Soit l’usine est implantée en milieu urbain et elle est rattachée à un réseau de chaleur pour utiliser l’énergie produite.
Soit elle est implantée en milieu rural et on implante, comme à Lasse, une activité annexe (serre de tomate). Cela représente 4 hectares.
Complément de réponse de Martin Cohen :
En milieu rural sans possibilité de valorisation de chaleur à proximité, une UVE peut également produire uniquement de l’électricité, avec des rendements plus faibles. La chaleur générée par la combustion des déchets est alors « perdue » vers l’atmosphère. C’est pour cela qu’on cherche d’abord des débouchés « chaleur » pour les projets d’UVE.
Potentiellement sur le site de Sonzay, éloigné de la métropole, il n’y a pas assez de logements pour profiter de la chaleur. Donc l’implantation d’une entreprise ou activité annexe est-elle prévue dans le projet ?
Réponse de Martin Cohen :
Pour Sonzay, un projet de production électrique est envisagé mais il y aurait de la perte de chaleur.
Soit on perd cette chaleur (on l’envoie dans l’atmosphère), soit on utilise cette chaleur fatale. Et donc il faudrait trouver une activité pour utiliser cette chaleur. Cela pourrait être une entreprise ou une activité type serre comme à Lasse, à proximité de l’UVE.
Pour le moment, à Sonzay, il n’y a pas de projet associé. Cela pourrait arriver ultérieurement mais à ce jour, cela n’est pas prévu dans le projet proposé à la concertation.
Réaction du maire de Sonzay :
Ce projet émane de Touraine Propre et non de la municipalité. Cela a été fait sans concertation, ni avec les propriétaires de terrain ni avec la municipalité, qui est opposée à ce projet. Elle est prête à discuter de la possibilité d’une UVE sur le site existant et uniquement sur le site existant.
Nous avons découvert ce projet lors de la brocante de Sonzay (cf .débat mobile du 26 mai organisé à Sonzay dans le cadre de cette concertation).
Remarque d’une habitante de Sonzay : Le terrain qui est délimité et qui figure dans le dossier de la concertation comprend des habitations, dont la sienne.
Réponse de Martin Cohen :
Il n’y a pas vraiment de terrain ni de site envisagé.
Il y a 3 ans, Touraine propre et la mairie de Sonzay ont eu des échanges à ce sujet. Concernant la carte qui figure dans le dossier de la concertation, elle représente une « grosse patate ». C’est une erreur de Touraine Propre de l’avoir fait figurer ainsi car c’est très approximatif.
3 sites sont envisagés pour l’implantation de l’UVE : les 2 sites situés près de la Métropole sont privilégiés pour pouvoir utiliser la chaleur produite avec un réseau de chaleur. Si cela n’est pas possible, le site de Sonzay serait alors envisagé.
Remarque d’une habitante de Sonzay : Une étude en amont a été lancée mais aucun des terrains n’est disponible. Les huit habitants de Sonzay, ici présents et concernés, refuseront de vendre leur terrain pour la réalisation de ce projet.
Réponse de Martin Cohen :
Il n’y pas de terrain que l’on souhaite. Il reste des réserves foncières prévues pour le site d’enfouissement.
Remarque d’une habitante de Sonzay : Vous pouvez donc acter que les habitants concernés ne seront pas expropriés.
Réponse de Martin Cohen :
Oui. C’est une erreur de Touraine Propre. Nous aurions dû mettre une pastille uniquement sur le site d’enfouissement. Cela va être corrigé dans le dossier de concertation. (nb: le dossier de concertation a été corrigé depuis, page 60)
Qui sont les investisseurs pour les réseaux de chaleur ?
Réponse de Monsieur Voiry :
La Métropole fonctionne en délégation de service public. Généralement ces réseaux de chaleur sont gérés par 4 gros opérateurs énergétiques. En France, il s’agit de Dalkia, Engie, Idex et Coriance.
Ces opérateurs investissent dans l’installation et l’exploitation pour une durée de 24 ans et revendent l’énergie aux adhérents.
Remarque d’un participant : Pour les utilisateurs, il faudrait donc deux échangeurs dont un pour transformer l’eau en eau chaude sanitaire.
Réponse de Monsieur Voiry :
Il existe deux solutions : un seul échangeur livré depuis le réseau de chaleur ou deux échangeurs, un pour le chauffage et un pour l’eau chaude. La métropole privilégie la prise en charge dans le modèle économique du réseau de chaleur et l’investissement de ces échangeurs sur les premiers abonnés.
L’utilisateur doit payer entre 4 000 et 5 000 euros pour le tuyau de raccordement. Ce qui correspond au prix d’une chaudière murale.
Remarque d’un participant : La chaleur est utilisée six mois par an pour le chauffage. Que devient la chaleur le reste du temps ?
Réponse de Monsieur Voiry :
Effectivement la chaleur est utilisée majoritairement en hiver mais en été cela permet d’arrêter les autres moyens de production(chaudière bois, gaz,…) qui alimentent également ces réseaux. La production de chaleur de ce projet d’UVE (40 GWh) correspond au besoin de chaleur estival identifié pour les réseaux de chaleur urbain de Tours Nord (cf .diapo 34 « Interactions UVE RCU de Tours Nord »). Ce projet d’UVE pourrait donc tout à fait continuer à produire de la chaleur en été, en réduisant l’activité des autres sources d’énergie.
Question d’un participant : Combien d’émissions de CO2 sont émises par le système à la fin de la production ?
Réponse de Monsieur Gérault :
Quand on analyse le CO2, il existe deux types d’émissions : des bonnes et des mauvaises. Les mauvaises sont appelées émissions non-biogéniques et elles ont un impact sur l’effet de serre. Pour l’usine de Lasse, cela représente 50% de nos émissions de CO2.
Cependant il faut noter que l’énergie produite par cette usine permet d’éviter l’utilisation d’autres ressources (fioul/gaz) qui sont émettrices de CO2. Les serres à tomates permettent également d’éviter des émissions, notamment celles générées par le transport de tomates venues de l’étranger .
Au vu de la complexité du sujet, le projet de bilan carbone de l’usine de Lasse a été confié à un cabinet extérieur.
L’objectif est d’arriver à un bilan carbone neutre. Il sera envoyé à Touraine Propre pour être intégré à la plateforme.
Remarque d’un participant : Il s’interroge sur le modèle économique des UVE qui choisissent la diversification et cite l’exemple du méthaniseur de Saint Paterne Racan qui alimentait une champignonnière, fermée depuis.
Réponse de Monsieur Gérault : En diversifiant la production, on pérennise le modèle. Cependant il faut être très vigilant et ne pas se tromper sur le mode de diversification choisi.
Remarque d’un participant : Pourquoi ne pas faire le choix du système utilisé à San Francisco ? C’est-à-dire un système de flux unique qui passe sur des chaînes de traitement couplé à l’enfouissement des déchets restants dans des casiers réversibles. Ca couterait moins cher et ce serait moins dangereux pour la santé.
Réponse du maire de Sonzay :
Il invite les personnes présentes à venir visiter le site d’enfouissement de Sonzay. Les fosses actuelles sont réversibles.
Remarque d’un participant : Il précise que l’on ne peut pas parler de décarbonisation de la chaleur puisqu’elle génère forcément des émissions de CO2. Il note également qu’à aucun moment les intervenants n’ont parlé des PFAS*.
Réponse de Monsieur Voiry : Oui la chaleur fatale n’est pas neutre en carbone, il s’agit en effet d’une approximation de ma part. Cette chaleur fatale peut cependant être récupérée pour éviter de recourir à des énergies fossiles plus émettrices en CO2 .
Réponse de Monsieur Gérault sur les PFAS :
Effectivement c’est une molécule qu’il va falloir traiter dans le futur.
Remarque d’un autre participant : Il mentionne une mission gouvernementale à venir pour lancer des recherches sur les impacts des PFAS notamment au niveau des incinérateurs.
*PFAS : Les substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées
Quelles sont les répercussions positives et négatives d’un site d’enfouissement par rapport à l’incinération ?
Réponse de Monsieur Gérault :
Je ne préfère pas répondre. Cela nécessite un apport scientifique et je ne serais pas exhaustif. Mais il y a un impact évident de l’enfouissement sur la pollution des nappes phréatiques.
Quels sont les critères pour choisir le site qui accueillera la future UVE et quelles personnes décideront ?
Réponse de Monsieur Cohen:
Concernant les critères, la valorisation énergétique est le premier critère. Le souhait est d’utiliser la chaleur fatale. Donc les sites près de la métropole sont privilégiés.
Ce choix sera fait, à la fin de la concertation, avec les élus locaux et nécessitera une autorisation préfectorale et sera précédé d’une enquête publique.
Remarque d’une habitante de Sonzay : si personne n’est d’accord et ne veut accueillir l’UVE sur son territoire, que se passe-t-il ?
Réponse de Monsieur Cohen :
L’objectif de cette concertation est justement d’éviter ce cas de figure. Si un accord n’est pas trouvé, deux solutions sont possibles :
-Soit on ne fait rien, on revient à la situation initiale et à partir de 2030 on exporte nos déchets loin du département avec des conséquences : plus de transport et moins de maitrise des coûts.
Soit une personne (élus locaux ou préfet) prend une décision brutale.