REPONSES A LA CONSULTATION PUBLIQUE DE TOURAINE PROPRE
NEVA a participé dès le début à l’élaboration du PLPDMA organisé et piloté par Touraine Propre.
Et nous avons été désagréablement surpris que les pouvoirs publics envisagent l’installation d’incinérateurs avant même la validation du PLPDMA.
Les PLPDMA sont obligatoire depuis 2012 pour réduire significativement le poids de nos ordures ménagères. Merci à Touraine propre et ses équipes de le porter.
Ce programme, porté par le syndicat mixte Touraine Propre et suivi par les communautés de communes du 37, est bien structuré et explore de nombreuses pistes avec pour objectif une baisse de 16% en 2030 par rapport à 2022. Nous pensons cependant qu’il pourrait aller plus loin dans bien des domaines avec notamment un investissement financier plus soutenu.
L’enjeu financier est important. Investir maintenant pour la prévention permet de ne pas investir beaucoup plus dans le futur pour assurer l’élimination de ce qui aurait pu être évité. Par exemple, il est prévu 4,5 M€ pour la prévention d’ici 2030, entre 120 et 160 M€ pour 2 incinérateurs à Chinon (40 ktonnes/an) et Tours Métropole (60ktonnes/an)…
NEVA est affiliée à la SEPANT et nous travaillons ensemble sur les sujets DMA.
Nous remercions Touraine propre de nous donner la possibilité de nous exprimer, nous avons participé à un certain nombre de rendez-vous de CAP 2030, et également aux réunions de la région et de la DREAL sur l’organisation de l’élimination des déchets dans notre département et de la région.
Vous trouverez ci-dessous nos réflexions et arguments sur ces sujets :
1. REFLEXIONS
Manque d’ambition
– Comme nous l’avons déjà exprimé, le PLPDMA manque d’ambition. Prévoir une réduction de 16% entre 2022 et 2030 alors que la poubelle OMR contient à l’heure actuelle entre 60 % et 80 % d’éléments qui ne devraient pas y être et que seul le traitement des bio-déchets (obligatoire depuis le 1er janvier 2024) peut engendrer une réduction de 15%.
– Il est primordial que des « Plans de prévention des déchets », avec une place pour les associations et les citoyens, soient enfin élaborés, animés et suivis localement par les collectivités, avec des moyens financiers et humains conséquents.
– Les collectivités doivent s’engager à soutenir les filières professionnelles et les actions liées à la prévention des déchets : compostage de proximité, vrac, réemploi, réparation, animations scolaires, formation des acteurs, audits et diagnostic, écoconception, lutte contre l’obsolescence…
– Au moins 5% des budgets engagés dans la « gestion des déchets » soient affectés à la prévention, et dès maintenant !
– Les échanges avec les citoyens ont pour objectif de formuler des pistes et opportunités d’organisation, de soutien de structures et d’alternatives (amélioration du compostage, ressourcerie, lutte contre les gaspillages, ateliers de réparation, filières de consignes…) qui respectent la hiérarchie des modes de traitement, favorisent la création d’emploi et protègent l’environnement.
Les associations contestent les trop faibles ambitions de réduction des collectivités pour 2030 et l’indétermination pour les décennies suivantes. Et, par conséquent, mettent en question les données qui calibrent les capacités annuelles de traitement de deux nouveaux incinérateurs appelés « UVE » Unité de Valorisation Énergétique projetés par Touraine propre et les collectivités
Nous demandons que :
– le PLPDMA soit redimensionné de 16% à 35%.
– Les dimensionnements des Unités de valorisation des déchets soient recalculés à partir d’une réduction des déchets de 35%.
2. ÉLIMINATION/PREVENTION
La prévention est la priorité. L’incinération doit rester une exception, uniquement pour les déchets ultimes, après Prévention, Réemploi et Recyclage !
– axer la communication sur l’habitat collectif en variant les vecteurs et en prenant en compte les difficultés sociales et les conditions d’habitat.
– L’incinération invisibilise les déchets résiduels, et escamote la nécessité absolue de réduire drastiquement la production de ces déchets. Par ce simple effet de « la poussière sous le tapis », elle entrave les efforts de prévention. Coûteuse en investissement, elle consomme aussi des sommes qui devraient être consacrées à la prévention (la plupart des EPCI consacrent moins de 5% de leur budget « déchets » à la prévention). Mais surtout, un incinérateur a cette particularité qu’il ne fonctionne bien que s’il est continûment à four plein : une fois construit et sur toute sa durée de vie il faut lui assurer son tonnage de déchets résiduels, et donc, sur toute sa durée de vie ne pas baisser ce tonnage ; on parle à juste titre d’ « aspirateur à déchets ».
– Il est avéré que l’incinération, même très encadrée, émet des polluants dans l’air durant des dizaines d’années, des milliers de tonnes par an de CO2 et produit des déchets ultimes toxiques (environ 25% des déchets entrants).
– Tant qu’il reste dans l’incinérateur des matières évitables, réutilisables, recyclables, la production d’énergie ou d’hydrogène en récupérant la chaleur de l’incinérateur, telle qu’envisagée, conduit à un gaspillage de ressources qui étaient destinées à une valorisation matière, prioritaire sur la valorisation énergétique.
– Surcapacité alors qu’il reste, dans les sacs noirs incinérés, 30% de déchets compostables, des piles, du verre, de l’aluminium, du papier, des tissus au total plus de 2/3 de déchets qui n’ont rien à y faire ?
– En l’absence d’engagements précis et ambitieux en matière de prévention, l’incinération est un frein structurel à la réduction des déchets. Elle reste une activité polluante soumise à la Taxe Générale d’Activité Polluante (TGAP) et constitue un fardeau financier pour les contribuables.
-Nous demandons que les études des systèmes d’élimination soient calibrées à partir d’une réduction des déchets ambitieux -35%
3. TAXE (OU REDEVANCE) INCITATIVE
– l’ADEME a identifié 2 leviers majeurs pour réduire les OMR : sortir les biodéchets et mettre en place la tarification incitative. Cette dernière manque cruellement au PLPDMA. Une tarification incitative à l’horizon augmente les résultats des actions de prévention.
Remarque : Il est vrai que la tarification incitative des OMR peut être potentiellement mal comprise voir mal acceptée. Une incitation par l’encouragement peut être envisagée pour positiver la démarche. Elle pourrait se décliner à la place de la taxe ou en complément, et pourrait être déclinée au moins de 2 façons différentes : au vu des résultats de diminution du volume des déchets par secteur (quartier, commune, communauté de communes,…), il pourrait être octroyé un bonus (sur la taxe ou redevance incitative) ou une récompense suite à un challenge (meilleures pratiques, résultats par catégories d’utilisateurs,…) organisé par Touraine Propre ou par les EPCI (type Défi des écoles).
– Les associations attendent des collectivités une lutte contre la surproduction des déchets par la généralisation de la Tarification Incitative, correspondant à l’objectif réglementaire fixé par le Conseil régional de 68% de Tarification Incitative (T.I.) en 2031.
– il ne faut pas que les élections municipales de 2026 soient un frein à l’essai de la mise en place de la tarification incitative
Nous demandons que les Taxes ou redevances incitatives ou système de récompenses soient ajouté au PLPDMA.
4. L’INCINERATEUR
Principe :
– Par son principe, l’incinération est le seul moyen de traitement qui génère plus de déchets qu’il n’en traite…
– Brûler du carbone pour en faire du CO2, c’est produire un gaz à effet de serre et aggraver le dérèglement climatique. Les prévisions pour les 2 incinérateurs en projet sont de 55 ktonnes et 35 ktonnes de CO2 émis. Cela va à l’encontre de la réduction de 10 à 2 tonnes de CO2/an/français si la France veut respecter les accords de Paris.
– le bilan énergétique global de la combustion de déchets pour produire de l’énergie est particulièrement mauvais. Dans l’incinérateur, une partie de la chaleur est dépensée pour chauffer à haute température le mélange dont une partie ne produit pas d’énergie mais en consomme. Cette opération se réalise avec des rendements qui atteignent rarement 40%. On améliore ce rendement si on sait utiliser la chaleur résiduelle, par exemple dans des réseaux de chaleur urbains.
– la quantité et la qualité des déchets collectés va beaucoup varier dans les années à venir. Qui peut prédire leur contenu dans 10 ans, voir 30 ou 40 si on prend en compte la durée de vie d’un incinérateur ? Il semble compliqué, aujourd’hui, de dimensionner les incinérateurs et de faire le choix technologique du four lié au PCI (Pouvoir Calorifique Inférieur) des déchets et futurs déchets.
Aspect sanitaire :
Les unités de valorisation des déchets émettent différentes sortes de rejets (REFIOM, mâchefers, gaz).
Ces rejets sont dangereux pour l’homme et pour l’environnement.
Les Unités de valorisations émettent également une grande quantité de CO2.
Des moyens de réduction des émissions de ces polluants existent et doivent être calibrés pour répondre non pas aux normes actuelles mais aux normes futures, une longueur d’avance doit être prise afin de protéger l’environnement et la population de l’ensemble des polluants possibles.
-Nous demandons que le cahier des charges des unités de valorisation :
– Prenne en compte les dernières techniques existantes en matière de luttes contre les rejets solides, gazeux, liquides polluants.
– Prenne en compte les dernières techniques existantes de filtration des émissions de CO2
– Soit disponible pour consultation et modification par les associations.
La Surveillance du fonctionnement est un élément clef contre les pollutions :
– Nous demandons que la surveillance du bon fonctionnement des unités de valorisation des déchets soit optimisée à une maille très fine, de façon à anticiper toute émission anormale.
– Que les rapports d’anomalie soient disponibles et visibles par les associations.
Localisation :
– La chaîne logistique pour acheminer les déchets vers les unités de valorisation est très polluante.
-Nous demandons qu’une étude soit menée pour que cette chaîne logistique soit la moins émettrice possible de gaz à effet de serre.
-Le bilan carbone global doit être fait avant et après les installations et il doit-être communiqué aux associations.
– Le fret ferroviaire doit être étudié.
– L’incinérateur doit être suffisamment éloigné des premières habitations.
– Les voies d’accès doivent être suffisamment bien dimensionnées pour accueillir au mieux le flux de camions supplémentaire, idéalement avec un accès direct à une autoroute.
– Seulement 3 scénarios sont proposés. Pas de projet de territoire au sein des collectivités concernées amenant à une meilleure acceptabilité.
Investissement et coût :
Nous demandons que les contribuables soient informés sur les coûts de plusieurs scénarios de prévention/réduction de déchets et sur les risques techniques, environnementaux et financiers causés par des vides de four en cas de surcapacité de traitement.
5. COLLECTES
-Nous demandons :
-plus de contrôles de poubelles et refuser la collecte si nécessaire. 12 kg/habitant/an de verre dans les OMR…
– les citoyens ont accepté moins de collectes : passage de C2 à C1 pour les OMR. Un passage à C0,5 doit être réfléchi, modulable éventuellement selon les saisons. L’argent économisé doit aller à la prévention.
– De remettre en question la collecte des déchets verts. Beaucoup d’essence consommée pour transporter 80 % d’eau.
6. DECHETS VERTS
–Nous demandons :
– L’accélération de la mise en place du compostage. L’acte citoyen consiste à l’apport des biodéchets pour les sortir des OMR. L’entretien doit être assuré par des professionnels (associatifs ou agents).
Un référent de site ne doit pas assumer seul la recharge en broyat et l’utilisation du compost mûr.
– Pour les biodéchets, la réalisation d’une cartographie des PAV et des composteurs partagés sur l’ensemble du territoire (couverture à 100 % obligatoire)
– De faciliter le broyage de proximité.
– Le volume des déchets verts compostés doit être pris comme base principale dans les indicateurs au lieu du nombre de composteurs distribués.
7. RECYCLERIE
–Nous demandons :
– Le développement et le soutient des recycleries sur tous les territoires. Les emplois peuvent être pérennisés avec la valorisation des objets qui ne sont plus des déchets.
-Le rattachement d’une recyclerie à chaque déchetterie.
8. REEMPLOI
–Nous demandons de favoriser la constitution de filières de réemploi par exemple pour les D3E (entreprises et associations de réparation), le verre (consignes),… et en développant le « benchmark » avec les collectivités déjà engagées dans la bonne voie d’une réduction supérieure à 30%.
9. VRAC
– le vrac reste un modèle de vente élitiste, dans un grand nombre de cas, ses prix ne sont pas moins cher que les produits emballés. Et les produits principalement proposés dans les magasins sont bios, ce qui augmente leur prix par rapport aux produits non-bio emballés.
–
-Nous demandons :
Le soutient de la filière du vrac
-Le vrac doit être démocratisé et doit être accessible à toutes les types de consommateurs.
– Les collectivités qui doivent utiliser ou imposer le vrac pour leur achats (ex : restauration scolaire)
– le consommateur doit pouvoir déposer les suremballages à la sortie de chaque magasin comme le prévoit la loi. Cela inciterait les grandes surfaces à avoir des politiques d’achat plus vertueuses.
10. CONCLUSION
Avec le PLPDMA, on a une première approche d’une réelle politique des déchets.
L’inquiétude majeure est la nécessité que chaque EPCI fasse un plan local de prévention sachant que Touraine Propre aurait en charge une politique de prévention à hauteur de 2€ et les EPCI à 3€. On regrette que les sommes budgétées n’atteignent 5 €/habitant qu’à la fin du PLPDMA.
On est vivement inquiets pour la santé des habitants proche des futurs incinérateurs, notamment en l’absence de connaissances sur des molécules nocives (PFAS, effets cocktails). On notera qu’une campagne nationale de mesures des PFAS est en cours sur toutes les installations de traitement des déchets. Molécules dont on ne parlait pas il y a encore un an… Combien y-a-t-il de molécules également nocives non encore identifiées ?
La stratégie de prévention n’est pas assez ambitieuse, notamment sur le déploiement de la tarification incitative et du compostage.
On dénonce que la stratégie d’élimination est mise trop rapidement en place.
Concevoir l’incinérateur alors que la prévention est en cours de déploiement, que les filières REP se mettent en place, que les biodéchets commencent à sortir des OMR est un non-sens. La part des déchets que l’on peut sortir des OMR est encore trop élevée !
Grâce à la diminution des tonnages enfouis annuellement en Indre-et-Loire, les sites d’enfouissement sont autorisés par la Préfecture à prolonger leur activité. Il reste également de la capacité d’incinération dans les départements limitrophes. Le mur des déchets mis en avant depuis des années est un mirage destiné à faire peur.
Il est important de bien réfléchir au timing prévention/incinération. Profitons du temps qu’il reste pour être ambitieux et engagés pleinement dans la réduction des déchets. Le traitement (mode, volumes,…) ne doit venir que dans un second temps !
Nous vous remercions pour votre contribution à la concertation “Cap 2030 : vers une Touraine propre”.
L’ensemble de vos commentaires et suggestions va être étudié dans le cadre de la révision du programme départemental de prévention des déchets ménagers et assimilés (PLPDMA) et de la stratégie de traitement et de valorisation. Le bilan de cette concertation sera rendu public à la mi-octobre 2024.
Concernant les objectifs de réduction, le programme de prévention départemental (PLPDMA) propose un objectif de réduction des déchets ménagers et assimilés (DMA) de 16% entre 2022 et 2030. C’est-à-dire une réduction de 531 kg/hab/an à 446 kg/hab/an d’ici 2030. D’un point de vue réglementaire, cet objectif départemental répond et dépasse les objectifs régionaux fixés par le SRADDET.
Nous vous remercions pour votre contribution. Veuillez trouver ci-dessous un complément de réponse de Tours Métropole Val de Loire.
Au vue des baisses de tonnages d’ordures ménagères ces 3 dernières années, Tours Métropole est en train de revoir le dimensionnement à la baisse d’une éventuelle future UVE.
Si une implantation d’UVE avait lieu sur le territoire de la Métropole, l’étude prendra en compte l’ensemble des dernières techniques sur l’ensemble du process de traitement (allant des rejets solides, gazeux, liquides et REFIOM)
Le déploiement du PLPDMA d’ici fin 2024 a pour objectifs d’augmenter le volet prévention, de soutenir le vrac, de déployer le réemploi sur la Métropole, d’augmenter le nombre de marchés collectés en Biodéchets, d’accroitre les composteurs partagés sur l’ensemble du territoire, le développement d’une filière de réemploi et de recyclerie.